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Bonjour, j'espère que vous allez bien. En cette brumeuse matinée électorale, j'en profite pour rajouter un petit post à propos de l'engagement. Pour l'heure on a surtout parlé d'engagement politique au vu du contexte, du fait d'aller voter, de manifester, de distribuer des tracts, coller des affiches, participer à des meetings, diffuser des messages via internet, d'être délégué, leader ou n'importe quel poste d'un parti pour faire triompher ses opinions. Mais l'engagement passe aussi par d'autres actions concrètes notamment par l'expression artistique dans tous ses états.
Il existe depuis longtemps un conflit entre l'art engagé et l'art pour l'art. Pour certains c'est un signe de lâcheté de vouloir détacher son oeuvre du réel, pour d'autres c'est la souiller que de la compromettre avec les basses oeuvres de ce monde, notamment de la chose publique.
En guise d'interlude, cette belle chanson, interprétation Julien Clerc, paroles Etienne Roda-Gil.


A quoi sert une chanson désarmée ? Bonne question, il existe pourtant de multiples chants qui ne servent plus à grand chose. Quand Homère a composé l'Iliade, la guerre de Troie était terminée depuis des siècles. Il n'était pas du tout question d'appeler à lutter contre un adversaire ou de dire combien ce conflit avait été inutile et sanglant - comme on l'a fait après la Première guerre mondiale par exemple - mais bien au contraire de dire que ç'avait été très cool de s'entremassacrer, plus amusant en tout cas que de régenter des péquenots, et utile aux guerriers pour se construire une renommée posthume. Et vu le nombre de romans, films, tableaux, BDs, oeuvres musicales, jeux vidéos, etc bâtis sur le sujet on ne peut pas dire qu'ils aient raté leur coup !
En fait, cette question de l'engagement artistique est peut-être mal posée, parce qu'en fin de compte aucun art n'est pur. Chaque oeuvre exprime une réalité, elle la met donc en valeur ce qui vaudra à cette parcelle de réel son comptant de blames, louanges et propos nuancés. Même les artistes les plus nihilistes trouvent une utilité à leur oeuvre, sinon ils ne l'écriraient pas.
H.P Lovecraft, écrivain misanthrope et dépréssif voyait les hommes comme de faibles créatures, perdues dans l'univers à la merci d'obscures forces cosmiques. Il ne croyait pas à grand chose et estimait ses écrits plutôt dérisoires, il n'empêche que ses angoisses, personnifiées dans ses nouvelles par Cthulhu, Nyarlathotep et compagnie - des monstres antédiluviens, tentaculaires et écailleux - font aujourd'hui le bonheur de milliers de lecteurs, gameurs et cercles de rollistes - amateurs de jeux de rôles pour ceux qui ne connaissent pas. Comme quoi, on peut être utile a beaucoup de gens, pas forcément pour ce que l'on escomptait, pour un engagement que l'on ne voyait pas comme tel.
Je vous quitte sur deux versions très différentes de Cthulhu, bon dimanche et bon début de semaine à tous.

Commentaires

  1. Le Cthulhu de gauche est plus classe, mais celui de droite en mode Kawai est plus terrifiant car mignon !
    Dieu seul sait quelles atrocités il va faire à ces petit chatons...

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    1. Je tenais à trouver un Cthulhu kawaï pour l'effet de contraste et ne t'inquiètes pas trop pour les petits chats à eux deux ils sont plus gros que lui ! En tout cas merci pour tes commentaires.

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  2. Ne pousses-tu pas un peu loin lorsque tu dis, certes avec ironie, que l'Iliade a pour but de montrer "comme c'est cool de s'entremassacrer"?(Jacqueline de Romilly doit se retourner dans sa tombe si elle en a une car je crois qu'elle est partie en fumée)(Homère, je ne sais pas!) O.K.pour la gloire posthume des héros. Mais l'Iliade n'est-elle pas aussi, à sa manière, une réflexion sur l'engagement? Ces grecs aux idées courtes se sont engagés pour défendre le bon droit, celui de l'époux bafoué(enfin, du moins c'est ce que dit la légende), sans réfléchir que la perspective de s'emparer des richesses de Troie y était peut-être aussi pour quelque chose.S'engager, mais y réfléchir à deux fois...D'autre part, n'est-il pas étrange que dans cette oeuvre grecque, les "humanistes", si je puis utiliser cet anachronisme, soient les Troyens? Car enfin, le héros, c'est Hector et non Ulysse!

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    1. La beauté n'était qu'un beau prétexte, les hommes ont toujours besoin de buts plus ou moins honnêtes pour mener une guerre ou un combat. Sans cela il n'y a plus qu'à rester chez soi regarder le monde bouger... C'est d'ailleurs la posture de certains philosophes mais quand à savoir ce qui est le mieux... Je ne me lancerai pas dans ce débat je n'aurais jamais assez d'espace !

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