Choral hellène

Bonsoir, terminons l'été par un petit détour vers la littérature grecque contemporaine que j'ai peu évoquée jusqu'alors avec un roman choral inspiré La septième dépouille/Το έβδομο ρούχο d'Eugénia Fakinou, paru pour la première fois en France en 1998 et réédité en juin 2018.
Le récit débute par le chant d'un arbre, dans un hameau isolé de la campagne grecque au début des années quatre-vingt. Un homme, Fotos, se meurt, rongé par un sinistre secret. Veillé par les siens, il réclame à son chevet sa sœur favorite qui a fuit le village pour Athènes, longtemps auparavant. C'est sa nièce, Roula, qui entreprend le voyage depuis la capitale à la place de sa mère défunte et découvre, assistant à cette agonie, une famille et des rites qu'elle ne soupçonnait pas. Étrange coutume en effet que ce banquet funèbre où siègent les défroques mortuaires des fils aînés de chaque générations de cette lignée implantée en Thessalie depuis la guerre d'indépendance. Les voix de trois femmes, Déméter, la mère exilée aussi fertile et malmenée que la terre des champs, Hélène, la jumelle de Fotos, pilier de la famille demeurée vierge pour se consacrer à l'écoute des oracles, et Roula, la jeune citadine à la gouaille décomplexée, content chacune à sa manière la destinée de leur clan greffée à l'histoire tourmentée du pays. La fuite des Grecs de Smyrne chassés par les Turcs, l'occupation allemande et la guerre civile suivie de la dictature sont autant d'heures de gloire et de malheur où hommes et femmes du commun en viennent à se confondre avec les figures mythiques des temps héroïques. Il en résulte un court mais ambitieux roman polyphonique à la prose élégiaque fourmillant de références appartenant aussi bien aux anciens mythes qu'à la culture populaire que je recommande à tous les amateurs de tableaux épiques et intimes.
Fiançailles par Nikolaos Gyzis (1875)
Terminons par quelques pas de sirtaki, à bientôt !

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