Mésalliance

Bonsoir, aujourd'hui nous parlerons d'amour et de lutte des classes. N'en déplaise au romantisme les inclinaisons n'obéissent pas au hasard, c'est un fait statistique, la plupart des gens ont une nette tendance à l'homogamie, c'est-à-dire à se mettre en couple et à fonder une famille avec une personne issue du même milieu qu'eux. Même s'il y a d'avantage de mixité sociale aujourd'hui qu'il y a quelques décennies, ce fossé persiste. Dans ses conditions à quelles difficiles conditions de survie sont confrontés les amours mixtes ? Examinons-en quelques-unes à travers un roman et un film. Écrit d'après une pièce de Witold Gombrovicz, le roman Sept ans/Sieben Jahre de l'écrivain suisse Peter Stamm, publié en 2009 revisite le topos du triangle amoureux avec subtilité.
La pièce de Gombrowicz Yvonne princesse de Bourgogne, datant de 1938, contait l'histoire d'un prince délaissant de superbes prétendantes pour se fiancer à une femme laide et insignifiante dont la muette présence révélait à tous les hauts personnages de la cour leurs insuffisances et leurs vices. De même, les protagonistes de Stamm, Alexander et Sonia forme un couple parfait. Tous deux sont jeunes, beaux, architectes prometteurs propriétaires d'une agence à Munich. Seule ombre au tableau, la relation parallèle qu'a entretenu Alexander, l'été de leur rencontre à la fin des années quatre-vingt, avec Iwona, une polonaise sans-papier. Une femme timide et peu attirante dont le souvenir continue à peser sur sa vie, et avec qui Alexander renouera au bout de sept ans de mariage, incapable de renoncer à elle comme de l'inclure dans sa vie. Une relation bizarre, fondée tant sur obsession sensuelle inexplicable que par le désir de trouver un refuge à la pression de réussite à laquelle l'engage tant son métier que son couple officiel. Union tranquillement fonctionnelle, lisse et esthétique comme les constructions de Le Corbusier que Sonia admire. Où se trouve la mésalliance ? Difficile de le dire, d'autant plus que les revirements inattendus des personnages et une écriture assez distante et peu introspective rendent ce récit plus opaque. Un petit traité des passions humaines à découvrir.    

Pas son genre de Lucas Belvaux sorti en 2013, adaptation du roman éponyme de Philippe Vilain publié en 2011, navigue avec justesse entre la comédie romantique et l'étude sociétale.
Clément, professeur de philosophie parisien mélancolique vient à son grand dam d'être muté dans un lycée d'Arras. Il y fait la rencontre de Jennifer, pétulante coiffeuse et mère divorcée d'un petit garçon. Très vite ces deux protagonistes antithétiques tombent amoureux, si leur entente sentimentale semble idéale qu'en est-il de l'union intellectuelle ? Chacun fait des efforts notables pour comprendre l'univers de l'autre et s'y intéresser, la philosophie de Kant, les écrits naturalistes et le spleen de Paris, constituant tout comme la presse people, les romans populaires et les séances de karaoké, des univers insolites, mais pas inaccessibles. Si Jennifer est moins cultivé que Clément, elle n'en est pas moins intelligente et sensible. Leur liaison sera d'avantage minée par l'absence de perspective d'avenir commun du à leurs divergences sur la conception d'un couple, et une série de petites désillusions cruelles vis-à-vis de leurs proches, que par le manque de connivence et d'attraits. Un film attachant et plutôt futé à découvrir, mention spéciale à la superbe photographie qui magnifie la ville d'Arras sous la grisaille ou les couleurs du carnaval !
 
Terminons par un rock anglais à l'esthétique déjantée, à bientôt !

Commentaires

  1. Bjr.Le personnage de la coiffeuse dans le film est assez exceptionnel. Dans la réalité, hélas, on n'accède pas aussi facilement à l'univers de l'autre, surtout quand on est persuadé qu'on n'a rien à en tirer...Pour essayer d'intéresser aux bouquins,un copain ouvrier ( bac professionnel) je lui faisais la lecture,d'extraits de livres soigneusement choisis pour leur accessibilité, courts, mais intéressant pour la réflexion.Il se disait intéressé,il comprenait mieux,disait-il que de lire seul. En fait c'était des miettes dans un agenda où lire n'avait pas sa place...Tout pour la musique, sono à fond, dès qu'il rentrait chez lui... Je me suis intéressée aux styles de musique qu'il écoutait mais il faut se rendre à l'évidence:chacun à son monde appartenant à une galaxie, et les galaxies vivent loin les unes des autres...

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    1. Bonsoir, la situation décrite dans le film n'est pas improbable, il est cependant vrai que les vies des gens restent très cloisonnées. Grâce à internet, on a le sentiment d'une plus grande proximité, voire parfois d'une porte ouverte sur l'existence d'autrui, des affinités qui se créent plus rapidement mais c'est une illusion. En réalité on ne voit que ce que les autres veulent bien montrer !

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