Absence

Bonjour, novembre étant le mois des fêtes des défunts, nous présenterons aujourd'hui un texte écrit en l'honneur d'une figure féminine anonyme, Oublier Clémence de la romancière et mathématicienne Michèle Audin, paru en 2018.
Que dire d'une fille quand elle est morte dans sa vingt-deuxième année, il y a plus d'un siècle, et n'a accompli aucun fait qui ai perpétué son souvenir dans l'Histoire ? Tout ce que l'on sait de l'existence de Clémence, née en 1879 et morte en 1901, tient en cinq lignes d'état civil. Ouvrière en soie issue d'une modeste famille, elle a passé toute sa vie en région lyonnaise, s'est mariée de bonne heure et a donné naissance à deux enfants dont l'aîné n'a vécu que quelques semaines. La cause même du décès de cette jeune femme demeure inconnue. Rien de romanesque dans son destin bref et laborieux, identique à celui de milliers de petites gens. Alors pour tenter de restituer un peu de consistance à la biographie de Clémence, l'autrice décortique mot à mot son état civil, replaçant chacun de ses éléments en regard du contexte politique, social et littéraire de l'époque. S'interrogeant sur le regard et les sentiments de la jeune disparue, sa place dans ce monde désormais si lointain. Sous la contrainte oulipienne, l'émotion affleure lorsque les dernières pages dévoilent la descendance de Clémence. Au contraire de sa mère, son fils survivant mourra à un âge avancé, laissant de nombreux enfants et petits-enfants, parmi lesquels l'autrice de ce récit. Sa plume sobre et délicate offre à son aïeule inconnue un tombeau littéraire réussi. L'assurance de surmonter son absence, un remède à l'oubli. Il en résulte un bel hommage filial que je conseille dès le collège à tous les lecteurs.
Filature du nord ; mise en ballot de la laine par Ferdinand Gueldry (1913)
Terminons par une ode à l'indolence pour toutes les clémences, à bientôt !

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