Ballades floréales

Bonsoir, je prépare actuellement un gros article sur un sujet difficile et compliqué que je ne posterai que dans une dizaine de jours. En attendant, je vous offre un intermède poétique, des poèmes amoureux embaumant le mois de mai, celui du renouveau et de la floraison.  
Commençons par l'une des cent Ballades de Christine de Pisan (1364-1430), l'une des premières femmes de lettres "professionnelles" connue. Née d'un père médecin et astrologue, elle reçut une excellente éducation et composa ses premiers textes à l'adolescence. Devenue veuve à vingt-cinq ans au terme d'une dizaine d'années d'un mariage heureux, elle dut assurer sa survie et celle des siens, trois jeunes enfants, une mère et une nièce, en vivant de sa plume et multiplia les écrits dans les années qui suivirent. Elle publia aussi bien de la poésie que des ouvrages savants, dénonçant notamment le manque de protection et de droits des femmes et des enfants. Ci-dessous Christine de Pisan présentant ses œuvres à la reine Isabeau de Bavière.

Ballade

Or est venu le très gracieux moys
De May le gay, ou tant a de doulçours,
Que ces vergiers, ces buissons et ces bois,

Sont tout chargiez de verdure et de flours,
Et toute riens se resjoye.
Parmi ces champs tout flourist et verdoye
Ne il n'est riens qui n'entroublie esmay,

Pour la doulçour du jolis moys de May.
Ces oisillons vont chantant par degois,
Tout s'esjouïst partout de commun cours,
Fors moy, helas! qui sueffre trop d'anois,

Pour ce que loings je suis de mes amours;
Ne je ne pourroye avoir joye,
Et plus est gay le temps et plus m'anoye.
Mais mieulx cognois adès s'oncques amay,

Pour la doulçour du jolis moys de May.
Dont regreter en plourant maintes fois
Me fault cellui, dont je n'ay nul secours;
Et les griefs maulx d'amours plus fort cognois,

Les pointures, les assaulx et les tours,
En ce doulz temps, que je n'avoye
Oncques mais fait; car toute me desvoye
Le grant desir qu'adès trop plus ferme ay

Pour la doulçour du jolis moys de May
Poursuivons sur une très sensuelle ode de Pauline Mary Tarn, alias Renée Vivien (1877-1909), poétesse franco-britannique et coqueluche de la belle époque, choquant par son audace, sa liberté et son lesbianisme affiché, décédée prématurément après avoir brûlé sa vie par les deux bouts. Le poème ci-dessous où l'amour se mêle aux émanations des plantes et du printemps porte le nom donné au mois de mai dans le calendrier républicain. Il est extrait du recueil Echos et reflets (1903).

Floréal

Je t’aime dans l’odeur des roses
Mourantes, quand il se fait tard,
Quand, sous tes paupières mi-closes,
S’alanguit ton pâle regard.
Mon âme tendrement troublée
T’aime dans l’odeur des lilas,
Lorsque ruisselle la coulée
Du clair midi sur les fronts las.
O ma Maîtresse, ô mon Amie,
Je t’aime en l’odeur des œillets…
Le bleu de ta chambre endormie
S’attendrit parmi les regrets…
Dans l’odeur de la violette,
Le réveil par Eva Gonzalès (1878)
J’aime la grâce de ton corps,
Tandis que le miroir reflète
L’éclat des ambres et des ors.
Dans l’odeur de la tubéreuse,
Je t’aime d’un mauvais désir,
A l’heure où l’aurore amoureuse
Se pâme avec un frais soupir.
Et, dans l’odeur de l’aubépine,
J’aime tes yeux pleins d’éclairs bruns…
O ma Maîtresse, ô ma Divine !
Je te mêle à tous les parfums

Terminons en chanson sur un bon air de rock indé, à bientôt !

Commentaires

  1. J'aime. Oui je sais c'est un peu court mais bon... il fait beau et dehors m'appelle...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Courrez ! Je poste ces poèmes printaniers pour inciter à répondre à l'appel du dehors ^^

      Supprimer

Enregistrer un commentaire

Articles les plus consultés